Said Boustany - Fondateur des Sections II de l'Université Libanaise, et figure de la lutte contre l'arabisation de l'enseignement.

Fondateur de l'Université Libanaise - Sections II-
un projet d’espoir pour les Libanais de régions chrétiennes.

"Malgré les réclamations des étudiants et de nombreux membres du corps professoral, l'Université Libanaise - Sections II- ne porta jamais officiellement le nom de son Fondateur Said Boustany, probablement par la jalousie de certains professeurs collègues influents, qui une fois le Lion disparu, se sont rués sur ses vestiges. Malheureusement, comme dans toute guerre, ce sont les vaillants courageux combattants qui meurent et certains lâches qui survivent et récoltent les lauriers."

Uni

Nécessité absolue au plan national, L'Université Libanaise - Sections 2 - a été fondée pour répondre à un besoin urgent. La guerre qui a sévi de longues années a poussé à la création des sections des différentes facultés et instituts. En effet, l'insécurité des routes, les difficultés rencontrées par les étudiants pour arriver à Beyrouth, obligent les responsables à la fondation de ces sections. Toutefois, les programmes sont les mêmes dans toutes les sections; le mode d'examen, les matières enseignées, les diplômes sont les mêmes; l'Administration Centrale est restée unie, malgré les affres de la guerre.
Le projet des Sections 2 de l’Université est une initiative du Professeur Said Boustany qui a constaté la nécessité de créer un espace de liberté, de dialogue et de réflexion dans un pays dévasté par la tyrannie, la guerre, la rareté et la pauvreté de l’enseignement dispensé à des jeunes générations sacrifiées et sans avenir.
Mais depuis le déclenchement de la guerre civile, les deux derniers volets confessionnels de leur enseignement ne sont plus assurés de manière ouverte, le gouvernement n’étant pas structuré pour offrir à la région Est chrétienne une protection qui permette à ses membres de continuer à se considérer comme des citoyens ordinaires de ce pays. La communauté chrétienne se trouve en effet menacée dans son existence même, économiquement asphyxiée, socialement marginalisée et contrainte au cloisonnement dans ses régions. Nombre de ses membres se résignent donc à un exil douloureux.
Dans ces conditions, Professeur Said Boustany a choisi de s’adapter – plutôt que de renoncer – en orientant ses efforts sur un projet éducatif universitaire, destiné à participer à la reconstruction de leur pays en s’attachant à celle des esprits, esprits soumis depuis trente ans à la dictature, à l’absence d’information et de culture, et depuis dix ans, à la guerre, à la division, à la haine intercommunautaire et au terrorisme.

L'éducation et l'instruction des habitants des zones Chrétiennes de Beyrouth n’étaient pas concevables dans ces conditions. Il était donc nécessaire d’oser une autre approche, d’imaginer un espace de liberté, de dialogue et de recherche comme fondement d’une transmission du savoir et de la réflexion, et afin de compenser l'état de siège culturel imposé aux régions Est.

En 1970, il a donc audacieusement décidé de lancer une équipe de réflexion dans son appartement de Ain Remaneh, sur la nécessité de l’ouverture de sections nouvelles de l’université Libanaise dans les régions Est de Beyrouth.
L’achèvement des premières salles de cours était en lui-même un exploit incroyable.

Il reste à poursuivre et à trouver d’autres bâtiments (salles de cours et de conférence), à les équiper, à les aménager et à acquérir le matériel nécessaire, afin de dispenser les cours d’enseignement.
Ce qui illustre l’ouverture de cette jeune université pour qui le Professeur Saïd Boustany a deux exigences : la liberté qui est nécessaire à son ouverture à tous, la qualité qui garantit sa pérennité.
Ainsi, Il a changé durablement l'avenir du Liban et le quotidien des étudiants.
Certains avaient des idées, Said Boustany était dans l'action.
Cette dynamique se traduit par des faits, des actes, des mesures concrètes dont les premières seront mises en œuvre immédiatement.
Il a fallu, en pleines batailles, l'aide Bachir Gemayel pour récupérer les Tampons officiels du centre ville en feu, afin d'apposer les tampons sur les documents officiels de publication des décrets de l'université. Il a travaillé d’arrache-pied, avec tous ses collègues de l'université, du Gouvernement, pour redonner de l’espoir à toutes celles et ceux qui habitent ces quartiers isolés et qui attendent.
Les étudiants rencontrent des difficultés croissantes pour se rendre à l'uni. Cette situation ne peut plus durer et exige la mobilisation de dispositifs exceptionnels et innovants.
Il a mobilisé le clergé maronite, Kasslik et Antonins, ainsi que les jésuites, Tous, avaient une tradition dans l'enseignement et l'éducation.
Ils l'ont aidé à trouver et ont fourni des Locaux pour accueillir les différentes facultés de l'Uni. Le staff professoral était réuni.

Depuis leur création, les autorités politiques post Guerre civile, n’ont eu de cesse que d’essayer de fermer et re-fusionner les deux sections de l’uni. En 1996, la réunification des facultés des Sciences Médicales, de Pharmacie et d'Agronomie a été réalisée. 

La Lutte contre l'Arabisation du système Educatif


Said Boustany, éminent professeur de littérature Arabe, n'était guère un partisan de l'arabisation à outrance, même s'il est issu de la dynastie des Boustany, famille ayant, à travers l'histoire, contribué efficacement à la renaissance de la culture et de la littérature Arabe. Cependant, Le fiasco Algérien de l'Arabisation, était pour lui, l'exemple même de ce qu'il ne fallait jamais subir. En effet, en Algérie, Comme il manquait d'instituteurs d'arabe classique, les autorités firent venir en catastrophe plus de 1000 instituteurs égyptiens. En réalité, ces instituteurs étaient des «maîtres de religion», non des «professeurs de langue». Quant à l'Égypte, elle était trop heureuse de se débarrasser des ces religieux encombrants du fait de leur appartenance au mouvement des Frères musulmans. Ainsi l'arabisation improvisée du président Ben Bella tourna à la catastrophe. L'arabe égyptien des «maîtres de religion» s'avéra problématique. Les Frères musulmans semèrent les germes du fondamentalisme musulman chez des milliers de petits Algériens. Puis l'Institut islamique fut créé à l’Université d’Alger, alors que l’ancienne licence d’arabe était transformée en licence unilingue sur le modèle oriental.

Au Liban, sous des apparences éducatives et patriotiques, le problème cachait en fait un arrière pensée politico-religieuse certaine. En réalité, ce n'était plus l'arabisation qui importait, mais consciemment ou inconsciemment, l'islamisation de l'enseignement. Said Boustany croyait que la religion, fusse-t-elle Chrétienne ou Musulmane, allait inévitablement jouer un rôle néfaste dans la société Libanaise. En effet, les religions portent en elles le poids des valeurs propres à une civilisation rurale archaïque et leur intégration à l'idéologie politique peut servir de frein à la modernisation du pays. Deuxièmement, les forces conservatrices vont s'appuyer sur la religion pour perpétuer des mœurs rétrogrades en ce qui concerne la famille, la condition féminine et les rapports dans la société. Trois décennies plus tard, ces prévisions paraissent d'une justesse remarquable.

Cependant les opposants à l'arabisation avaient devant leurs yeux, et à leur frontières, l'exemple des universités syriennes et Egyptiennes, dont le niveau éducatif, et les diplômes laissaient à désirer. Ainsi, la tache consistant à s'opposer à l'arabisation des programmes, s'en trouvait ainsi encore plus facile. Il est vrai que la formation fût-elle supérieure, demeure incomplète, si elle n'est pas acquise dans la langue du pays. Cependant l'assimilation du système éducatif Libanais dans la marée des systèmes éducatifs scolaires et universitaires Arabes, reconnus d'un niveau de loin inférieurs à l'enseignement au Liban, faisait craindre le pire à Said Boustany, au cas où les autorités politiques cédaient à l'Arabisation. En tout état de cause, A travers plusieurs conférences et débats télévisés, Saïd Boustany eu toujours gain de cause dans cette affaire nationale de première importance. En effet, pour un pays multiculturel tel que le Liban, qui ne faisait qu'importer et copier, s’occuper de la terminologie et des traductions, vérifier l’arabisation de l’environnement, diffuser dans tous les organismes nationaux des documents correctement arabisés et unifier les termes employés, ne l'emballait guerre, et plus, trouvait cela comme une tâche ridicule. Embaucher des équipes de traducteurs, tout simplement pour des raisons idéologiques, était pour lui une totale absurdité.

Cette politique d'arabisation intensive était considérée par Said Boustany comme l'une des plus graves erreurs pouvant mettre en péril tout le système d'éducation Libanais. Il a lutté et s'est opposé pendant des années contre cette tendance et a fini par avoir gain de cause.