Said Boustany - Une enfance courageuse

Saïd est né dans une famille paysanne de Marj-Barja, village des basses montagnes du Chouf, benjamin d'une famille composée de 4 frères, d'un père paysan nommé Salim, plutôt effacé et discret, devant une mère, Rashidé, dénommée dans le village "La sœur des hommes", du fait de son caractère très marqué et de son intelligence aigüe.
En Avril 1912, âgée alors de 25 ans et accompagnée de son oncle Abdallah Boustany, Rashidé émigra aux USA. elle rentra définitivement à Marj en 1921.
deux ans après, Naquit Saïd, quatrième enfant de la fratrie.

Said n'a non seulement jamais rougi de son enfance paysane, mais il s'y référait, et en était très fier. Il avait en ce sens un indéfectible attachement à ses racines, et considérait cette vie paysane comme un immense héritage humain. Il y a appris cette nécessité d’aller à l’essentiel.
Il fut inscrit à l'école publique de Barja, village Musulman voisin de Marj. Dès sa jeune enfance, il se démarqua par son intelligence, son courage et sa curiosité constructive. Il fut choisi pour suivre des études, alors que d'autres de ses frères devaient s'occuper des taches agricoles. C'était toute l'injustice des milieux paysans. Dans une même famille, Les frères ne pouvaient tous aller aux écoles, car d'entre eux, certains étaient voués bon gré mal gré, s'occuper du troupeau et des récoltes de vignes et d'olives.

Très jeune, à Six ans, il dût faire le trajet de l'école à pied, quelques kilomètres chaque jour, parfois sous un soleil de plomb. Il utilisait ses souliers comme casquette pour se protéger du soleil, et surtout pour économiser ses souliers de peur de les user. Avec ses petites jambes de six ans, il devait se réveiller tôt à l'aube, et rentrait tard.
Cela ne constituait pas simplement le seul soucis de ce trajet. En fait, tous les jours, enfant de confession chrétienne "minoritaire" dans le secteur, il devait affronter les bandes d'enfants musulmans de Barja. Sur la route aller - retour, il devait braver seul les bandes de garçons de Barja; lui, enfant chrétien, traversant un village musulman. Les jets de pierres étaient quotidiens, mais il avait le courage et la ténacité de les affronter; cela ne le dissuada nullement de se rendre à l'école. Mais Said, courageux et intelligent, trouva rapidement une solution à ce problème. Pour cela, son astuce était d'escalader la colline au dessus de la route; il avait ainsi plus de facilité à lancer les pierres sur ses agresseurs en contrebas.qui s'offraient le plaisir de l'insulter et de lui balancer des pierres au trajet aller-retour.
Très vite, Said fut repéré par ses professeurs.
Son intelligence lui fera sauter plusieurs classes et économisa ainsi plusieurs années scolaires, et ne tarda à être remarqué par ses professeurs, et surtout, par le grand évêque Maronite Ghostine Boustany, qui l'envoya continuer ses études chez les pères Jésuites de Beyrouth.
Afin d'assurer la gratuité de ses études, on lui conseilla de promettre à ceux-ci, qu'il ferait un cursus pour devenir moine jésuite; c'était apparemment l'astuce usuelle pour assurer de poursuivre des études gratuitement.
En fait, vers seize ans, il sauta au dessus du mur du couvent, et se débarrassa de sa soutane pour l'échanger par un costume civil. Ce n'était décidément pas une réelle vocation.
Son éducation scolaire, jusqu'au Baccalauréat, ne dura que 8 ans. A l'âge de seize ans, il avait son Baccalauréat. Il excellait dans le maniement de l'Arabe littéraire, le Français, et surtout, parlait couramment le Latin.
Il fut alors embauché chez les frères Antonins, comme professeur de Latin, enseignant cette matière à des moines qui étaient âgés de 23 ans en moyenne, alors que lui n'en avait que Dix sept. On raconte que, pour les tenir tranquilles, il leur promettait qu'à la fin de chaque heure de cours, il leur jouerait quelques airs à l'aide de la flûte de berger qu'il avait en permanence sur lui.
Ainsi Saïd démarra sa vie professionnelle.

Ses retours au village étaient fréquents, et plus tard, adulte, il se faisait un plaisir à passer tous ses week-ends à Marj, accompagné de toute la famille.

Ses souvenirs d’enfance, et son attachement à Marj n'était pas seulement entretenir une certaine nostalgie du passé, mais surtout à tisser un lien avec et, entre les générations futures afin de ne jamais oublier leurs origines.